Katmandou, le samedi 23 octobre.
Cela fait cinq ans que je n’ai mis les pieds dans ce pays. Et pourtant, cela semble être hier. Mes souvenirs ressurgissent dès notre arrivée. Il y a cinq ans, je m’étais laissé guidé par des amis. Il faut croire que mon cerveau avait enregistré les lieux. Je n’éprouve que peu de difficultés à retrouver mon chemin.
Le Népal est vraiment agréable à visiter. A notre arrivée à l’aéroport, nombre de chauffeurs auraient pu nous sauter dessus espérant nous emmener en ville moyennant des frais assez importants. Il n’en est rien. Bien évidemment, chacun s’essaie à vendre une course, mais finalement, ils ne sont pas insistants, et se prêtent volontiers à discuter un peu. Une carte nous est laissé, des fois que nous ayons besoin d’un chauffeur. L’intention est louable, même si à l’évidence, nous n’aurons pas besoin de ses services.
La petite différence notable, c’est que nous voyageons désormais à trois. Notre petit Philémon n’a pas encore deux ans. Il lui faudra s’adapter au pays… Ceci dit, lui qui focalise sur les bus, il devrait être gâté.
J’ose espérer que les bruits, les couleurs et odeurs népalais sauront éveiller ses sens.
Nous prenons place dans la Khatmandu garden guest house, au Nord de Thamel, dans le quartier “Paknajol”. On aura ici l’avantage d’être quelques peu isolé de l’incessant va et viens de piétons, taxi, rickshaw, et autre sans pour autant en être privé non plus. Le jardin que met cette guest house à notre disposition offrira à Philémon un terrain de jeu, ce qui n’est pas négligeable, pour lui comme pour nous.
Une première visite de la ville s’organise…
Je me surprends donc à retrouver mon chemin et à pouvoir guider ma petite famille. Une longue marche s’engage au cours de laquelle nous traverserons quelques quartiers de Katmandou. Philémon, à bout de bras, recevra tout au long du trajet quelques pincements de joue. Il lui faudra s’y faire… L’enfant est ici un roi à bénir, à chérir que chacun se plait à solliciter.
Nos hôtes nous disais qu’un enfant était un passeport. Nous le vérifions dès notre arrivée. Partout, les gens se prêtent facilement à jouer avec lui.
Notre promenade pédestre nous mènera ce jour au Swayambunat – on y retrouvera nombre de pèlerins venant faire tourner quelques moulins à prières, une odeur d’encens se consommant en tous points, quelques singes avides de nourriture -, au Durbar Square de Katmandou – on y croisera quelques saddhus posant sous les objectifs moyennant finance, quelques vendeurs d’objets en tout genre ; on y observera l’architecture newar traditionnelle reconnaissable à ses portes et fenêtres -, pour finir avec une traversée de Thamel du Sud au Nord, baignés dans le défilé incessant des piétons, sollicités de toutes part par les devantures avenantes des commerces,….
C’est là une amusante expérience à vivre ou à revivre : celle de retrouver tout ce monde, toutes ces cultures. Ici, on ne sait jamais si c’est le respect de l’autre ou son indifférence qui doit nous guider. Ici, chacun se plonge dans une sorte de nonchalance et continue son chemin, guidé par je ne sais quelle étoile. Comme le disais une amie : “dans ce pays, les dieux dominent véritablement”.
Duwacoat, retrouvailles, le dimanche 24 octobre.
Une des raisons principales qui nous ont menées au Népal est de revoir les différents enfants dont s’occupe l’association humanitaire Thanaka. Un appel est passé à Prithivi qui gère la maison d’accueil de Duwacoat.
Nous prenons donc la direction de la gare routière, histoire de traverser Tamel, de baigner un peu dans ce bordel organisé, de prendre le bon bus, vers Bhaktapur, de trouver une personne capable de nous dire à quel moment descendre. Et c’est parti.
Encore une fois, je suis surpris de retrouver mon chemin. Même si ce dernier me paraît plus éloigné que je ne le pensais, je retrouve très vite le « Thanaka hostel ». Très vite, nous retrouvons Prithivi et Surya. Quelques conversations s’engagent. Nous hallucinons à l’idée que cinq années se sont écoulées, nous partageons quelques nouvelles, avant d’aller chercher Chayan, qui s’empressa de saluer “Eric Uncle”… Je suis touché. Il a quatre ans. Nous en profiterons pour faire un tour sur Bhaktapur. J’en oublie presque d’observer la ville, aussi somptueuse soit-elle.
Je réalise que je viens avant tout au Népal pour retrouver des amis. De profonds souvenirs étaient enfouis mais ressurgissent immédiatement.

Quelques habitudes sont retrouvées, un plat de curd est acheté et nous repartons immédiatement dans le centre.
16h30. La porte s’ouvre et la dizaine d’enfants pris en charge par l’association, rentrant de l’école, pénètre dans l’enceinte.
Il est toujours surprenant de constater la sérénité qui habite chaque enfant. Chacun rentre silencieusement. La joie de nous voir est au rendez-vous mais, comme de coutumes au Népal, on ne l’exprime pas ouvertement. Les Namaste sont diffusés discrètement. Seuls les plus jeunes se prêtent à quelques jeux.
Chaque enfant engloutira un peu de curd avant de prendre position autour de la table pour pouvoir y faire ses devoirs.
Pour eux, pouvoir suivre ses études est une chance qu’il faut honorer.
Je suis pour ma part surpris par leur taille. Les enfants ont bien grandi depuis cinq ans. Certains suivront bientôt quelques études supérieures financées par l’association. Il retourneront alors dans leur famille et permettront au centre d’accueillir d’autres enfants en bas âge.
Quelques échanges ont lieu… Nous programmerons quelques sorties, notamment samedi prochain, seul jour sans école.
Il nous aura été difficile de quitter le centre ce soir. Nous partirons bien tardivement, en taxi, pour retourner dans notre guest house. Philémon y est roi. Le personnel s’amuse avec lui.
Duwacoat & Bhaktapur, le lundi 25 octobre.
Si nous n’avions pas pris la peine d’observer l’ancienne capitale hier, nous nous rattrapons ce jour. La ville avait déjà laissé dans ma mémoire un souvenir impérissable. Je suis de nouveau conquis. Ses rues pavées, sa prédominance de briques, ses étroites ruelles, ses passages,… Nous replongeons dans un passé lointain. Il semble que la vie de ses habitants n’a que peu évolué, à l’image des “papis de Bhaktapur”, fondateurs et préservateurs de la ville, qui prennent place sous les multiples porches de la ville.
Le calme domine ici véritablement. Les pagodes ancestrales, visibles à chaque détour d’une rue, rappellent au visiteur qu’il n’est ici que l’invité des dieux… Il n’est pas rare d’y croiser quelques statues, gravées dans la pierre. Les illustres personnages qu’elles représentent semblent nous observer… Une petite prière est lancée, quelques offrandes sont requises…
Ici, je me plais à penser que la ville ne subira pas les conséquence du temps et de la démographie. La ville étant classée à l’Unesco, sa restauration est garantie, son évolution ne se fera pas sans préserver ses charmes.
Nous errons donc un peu dans la ville et nous laissons guider par Prithivi et sa famille. Il n’est pas si simple que je le pensais de se déplacer avec un bébé. Notre petit Philémon ne pèse pas tout à fait dix kilos mais il se fait bien lourd dans mes bras… Moi qui adore errer et marcher, j’avoue m’enquêter de me reposer.
Nous pénétrons donc, au détour d’une rue, dans un bâtiment, prenons place dans une cour arborée où nous pourrons nous poser un peu… Quelques momos et autres nous ravirons pendant que nos bambins respectifs s’amuseront à courir tous azimuth.
Après quelques autres errance, nous prendrons ce jour aussi le chemin du centre d’accueil pour enfants défavorisés que gère Prithivi pour le compte de Thanaka. Je ne me lasserai jamais de les voir. Nous qui oeuvrons en France pour assurer leur éducation, il est satisfaisant de voir que nos actions portent ses fruits. Il me faudra dresser un compte rendu pour l’ensemble des membres.
Nous retrouvons le soir nos quartiers de Kathmandou, y rencontrons Dhana Lama, une autre personne clef de l’association Thanaka. Il a géré pour elle la construction d’un dispensaire dans son village natal, Birta Deurali. Ce centre est un véritable succès. Les médecins qui y exercent leurs activités sont de plus en plus sollicités.
Nous avons apporté quelques médicaments et les lui remettons dans la soirée.
Le monde est petit.
Nous avons prévu de prendre le chemin de Phokara demain et apprenons que Dhana s’y rend également pour accompagner un couple d’américains, amis de longue date, pour les guider. Nous aurons donc le plaisir de l’y retrouver et de partager un peu de temps.